gs1-neton-header-02.jpg

Le commerce de détail prend du retard

Le commerce de détail suisse est sous pression et il espère de meilleures affaires en 2018. La pression des prix, les commerçants en ligne et les touristes de l’achat stimulent le changement structurel.
Le commerce de détail devrait connaître une légère croissance en 2018. Selon le «Retail Outlook 2018» du Crédit Suisse, une croissance du chiffre d’affaires de 0,3 % est prévisible. Ceci se produit dans le contexte d’une évolution générale avantageuse sur le plan économique de la Suisse avec une augmentation du produit intérieur brut de 1,7 %, moins de chômeurs et un moral des consommateurs en hausse. L’essor économique devrait surtout soutenir la rémission de la demande dans le secteur non-food, plus sensible à la conjoncture. Par contre, le commerce de détail de produits alimentaires, fortement influencé par la croissance de la population, devrait se satisfaire d’une augmentation du chiffre d’affaires de 0,5 % en 2018. 
 
À côté de cette vue «top-down» macro-économique, le «Retail Outlook » comporte également une prévision «bottom-up», établie à partir d’un sondage auprès de plus de 220 experts du secteur. Il a été réalisé par le partenaire d’études Fuhrer & Hotz – Excellence in Retailing. Plus de 60 % de tous les revendeurs et fabricants ont budgété des chiffres d’affaires (en partie nettement) plus importants pour 2018. Concernant le bénéfice, près de la moitié de toutes les personnes interrogées envisagent une augmentation. De nombreuses entreprises actives dans le secteur non-food attendent la fin de l’évolution négative: par rapport au segment food / near-food, davantage de décisionnaires budgétisent des revenus ainsi que des rendements plus élevés. 
 
Gros plan sur le comportement d’achat 
Selon Marco Fuhrer, l’essentiel pour le détaillant aujourd’hui est d’analyser le comportement d’achat modifié des consommateurs et de comprendre le trajet du client avec tous ses points de contact, pour orienter le traitement du marché de manière optimale dans cette direction. La mise en relation des mondes en ligne et hors ligne au sens du commerce de détail «omnichannel » a ici la plus grande priorité, avec tous ses effets sur les surfaces stationnaires et la logistique. Ainsi le commerce de détail pourrait sortir en 2018 du creux de la vague qu’il traverse depuis un bon moment. Cependant il est en retard sur l’évolution générale de la conjoncture. Après deux années très difficiles, il a été possible en 2017 de stopper le recul du chiffre d’affaires du commerce total. Selon une estimation des experts du Crédit Suisse, la croissance nominale du chiffre d’affaires en 2017 s’est chiffrée à un petit 0,1 %. Derrière se trouvaient une demande réelle en hausse de 0,2 % et des prix plus bas de 0,1 %.
 
Les segments food / near-food et nonfood ont affiché en 2017 une augmentation réelle du chiffre d’affaires de 0,2 et 0,3 %. Les détaillants de l’alimentation ont pu en majorité maintenir leurs prix, malgré une concurrence nettement plus forte par Aldi et Lidl. Dans le segment food, la concurrence et la pression des prix renforcées au niveau national réclament une amélioration continue des processus de production et logistiques. Dans le segment nonfood, les prix ont continué à chuter pendant ce temps, mais moins fortement que pendant les années précédentes. Cependant le niveau de chiffre d’affaires dans de nombreux segments est nettement inférieur à celui d’avant le choc du franc suisse. 
 
Retard à rattraper dans le commerce en ligne 
Toutefois le commerce de détail reste économiquement parlant un terrain dur. Les conséquences tardives du renchérissement du franc suisse, le moral morose des consommateurs, le tourisme d’achat et la tendance au commerce en ligne ont leur prix. Le taux de faillite dans le commerce de détail a nettement augmenté depuis début 2015 et il était supérieur de 18,1 % un an plus tard. Il a encore augmenté de 15,2 % jusqu’au niveau le plus élevé des cas de faillite en juillet 2017. Depuis on distingue une inversion de tendance. Dans le reste du secteur des prestations de services, les chiffres des faillites ont augmenté moins fortement. L’importance du commerce en ligne justement est resté méconnu du secteur. En 2009, seul un cinquième des entreprises interrogées pour le «Retail Outlook» pensaient que le commerce électronique était un sujet important au sein du marketing de commerce. Aucun autre sujet n’a été si peu considéré. Aujourd’hui les choses sont différentes: «L’importance actuelle tout comme l’importance future du commerce en ligne est très différente selon le secteur et la catégorie», indique Marco Fuhrer.
 
En premier lieu les détaillants sont fortement encouragés à proposer des marchandises en dehors des besoins quotidiens. «Malheureusement, tous les détaillants stationnaires ne se sont pas encore adaptés à la nouvelle réalité, loin s’en faut», constate Fuhrer. Cette nouvelle réalité est conçue entre autres par Amazon. Beaucoup de choses ont été écrites à propos de l’entrée du groupe sur le marché en Suisse. Cependant le fait est que de nombreux clients et clientes suisses se procurent depuis longtemps la marchandise du détaillant en ligne via des points de retrait juste de l’autre côté de la frontière. Selon des estimations, environ un sixième du commerce en ligne étranger, soit plus de 250 millions de francs, a été traité en Suisse via des points de retrait en 2016. L’attrait d’Amazon dépend donc pour beaucoup de gens de leur propre lieu de résidence et de la proximité de la frontière. 
 
Entre Amazon et Zalando 
Par contre Zalando livre directement en Suisse. Après Digitec Galaxus, cette entreprise dont le siège est à Berlin est le principal détaillant en ligne en Suisse en termes de chiffre d’affaires. En 2016, une augmentation de 16 % environ a été enregistrée dans la région D-A-CH (regroupant l’Allemagne, l’Autriche et la Suisse). Le commerce en ligne suisse (hors offreurs étrangers) a augmenté de seulement la moitié au cours de la même période, avec une croissance du chiffre d’affaires de 8,5 %. Zalando ne présente aucun chiffre pour la Suisse, ils peuvent cependant être estimés grossièrement sur la base des données de l’Administration fédérale des douanes (AFD). Ainsi l’entreprise aurait réalisé en 2017 un chiffre d’affaires en Suisse de 624 millions de francs environ, après 488 millions l’année précédente. L’essentiel des ventes comportait des vêtements (deux tiers du chiffre d’affaires), des chaussures et des accessoires.
 
Face à une pression des prix élevée, une comparaison simple et une faible loyauté du client, les revendeurs en ligne doivent se positionner selon d’autres facteurs. Ils misent sur une grande convivialité de la boutique en ligne (clarté, intuition, communauté) ou sur des conditions de retours attrayantes. En plus, les marchandises arrivent toujours plus souvent à la maison par la «Poste A» suisse: en 2009 la part des livraisons prioritaires était de 5 %, en 2016 déjà de 40 %. Dans la tendance à l’omnicanal, les offreurs suisses ne sont pas en tête – une fois de plus. Bien que de nombreux revendeurs reconnaissent le potentiel des canaux de distribution intégrés et investissent de manière correspondante, les entreprises ailleurs sont rendues beaucoup plus loin. Selon une étude de 2015 pour laquelle 19 pays au total ont été examinés, les États-Unis arrivaient au premier rang à ce sujet, suivis par la Grande-Bretagne et l’Australie. La Suisse terminait à la 14ème place seulement.
 
Le tourisme d’achat assure également des bouleversements. Le microrecensement actuel «Mobilité et trafic» indique que 24 millions d’achats ciblés environ en boutiques stationnaires ont été effectués à l’étranger en 2015. Les consommateurs suisses ont ainsi fait leurs courses en moyenne trois fois par an à l’étranger, sans tenir compte des achats dans le cadre des autres voyages à l’étranger (visites, loisirs, vacances). Selon les calculs du Crédit Suisse, un achat à l’étranger est rentable financièrement pour une voiture à partir d’une somme dépensée de 274 francs en moyenne, soit 105 francs par personne.
 
Une étude de l’université de St-Gall a déterminé que le touriste d’achat moyen a dépensé environ 250 francs par achat en 2015. Au cours de l’année du choc du franc suisse, le tourisme d’achat n’était donc pas à considérer comme une initiative irrationnelle. Par contre, il était nettement moins rentable fin 2017. 
 
Alexander Saheb
 
Nach oben